
Vu dans Golias hebdo N°778
Eucharistie : comment l'église l'a cléricalisée
Paul Fleuret
Il faut l'affirmer : les sacrements sont créations de l'Eglise… c'est-à-dire du seul clergé hiérarchique. De fait, les pratiques sacramentelles ont pour effet de maintenir le peuple sous la tutelle ecclésiastique puisqu'il est obligé de passer par la parole et les actes des prêtres pour accéder à Dieu. Voyons donc ce qu'il en est de l'eucharistie
Il faut d'abord regarder les lettres de Paul qui sont les plus anciens écrits chrétiens. En 1 Co 11, Paul emploie les mots réunion, assemblée (ekklesia), repas du Seigneur. Il rappelle le dernier repas de Jésus et ses paroles prononcées pour le partage du pain et du vin. Il admoneste les Corinthiens sur leur pratique qui n'est pas fraternelle : lors du repas, les riches ne partagent pas avec les pauvres, puis on « mange le pain et boit de la coupe », ce qui est « annonce de la mort du Seigneur jusqu'à ce qu'il vienne ». Mais rien n'est dit sur une éventuelle présidence de ce repas - qui avait lieu sans doute dans la maison d'un riche - ni sur un rite formalisé.
Il est difficile de sortir des évangiles quelque indication sur les pratiques eucharistiques des premiers chrétiens, à partir des récits du dernier repas de Jésus avec ses disciples. Le livre des Actes, pour désigner les repas communautaires, emploie l'expression fraction du pain (2, 42) « Ils étaient fidèles à la fraction du pain », expression employée aussi par le même Luc dans le récit dit des disciples d'Emmaüs : « Ils l'avaient reconnu à la fraction du pain » (Lc 24, 35).
La Didachè, écrit judéo-chrétien de la fin du premier siècle, rapporte des prescriptions liturgiques : « Pour l'eucharistie, rendez grâce de cette manière… » Suit alors (IX et X) une prière d'action de grâces à la personne nous - donc pas de traces d'un ou d'une éventuel. le présidente. Le récit de la cène ultime de Jésus ne figure pas dans le texte. En finale, il est recommandé : « Laissez les prophètes rendre grâces autant qu'ils voudront », ce qui signale une grande liberté rituelle. En XIV, nouvelles prescriptions : « Le jour dominical du Seigneur, rassemblez-vous pour rompre le pain et rendre grâces », sans aucune précision rituelle. Quelques lignes plus loin, ceci : « Elisez-vous des épiscopes et des diacres car ils exercent pour vous le ministère des prophètes et docteurs » - rien ne permet de dire qu'ils président la célébration.
Justin de Naplouse, mort vers 165, a écrit des Apologies dans lesquelles il donne des indications sur les pratiques liturgiques à Rome : on y remarque l'apparition d'un président de célébration. On lit dans l'Apologie 1 : « On apporte à celui qui préside l’assemblée du pain et une coupe de vin trempé (d'eau). Il les prend, rend louange et gloire au Père… et fait ensuite une longue action de grâce (eucharistie) pour tous les biens que nous avons reçus de lui. Quand il a terminé, tout le peuple présent acclame en disant : Amen. Ceux que nous appelons diacres distribuent à tous les assistants le pain, le vin et l’eau consacrés, et ils en portent aux absents » (1.65). Ignace d'Antioche, mort vers 110, écrit aux chrétiens de Smyrne : « Que cette eucharistie seule soit regardée comme légitime, qui se fait sous la présidence de l’épiscope ou de celui qu'il en aura chargé » (Sm. 8,1-2).
Donc, dès le IIe siècle, le Repas du Seigneur, qui consistait en un repas communautaire pris dans une maison familiale, prend une coloration liturgique et rituelle marquée, et ce, sous la présidence d'un seul homme : l'épiscope. Il serait fastidieux et trop long de suivre le développement de cette pratique au long des siècles et des conciles successifs. Ce qui est évident, c'est que le peuple s'est trouvé exclu des rites désormais confiés à un « ordre », à un corps clérical revendiquant un caractère sacré prétendument voulu de Dieu et reçu par lui.
De nos jours…
Le Droit Canon catholique (DC) et le Catéchisme de l'Eglise catholique (CEC) : voilà une littérature peu enthousiasmante. Et pourtant, on devrait s'y pencher plus souvent, car c'est dans ces textes que se définissent le fonctionnement du pouvoir papal, épiscopal et presbytéral… et la situation de dépendance du peuple des laïcs.
Tout d'abord, un beau principe : « Entre tous les fidèles, du fait de leur régénération dans le Christ, il existe quant à la dignité et à l'activité, une véritable égalité en vertu de laquelle tous coopèrent à l'édification du Corps du Christ, selon la condition et la fonction propres de chacun ». (DC 208). Ceci dit, viennent des restrictions : « Par institution divine, il y a dans l'Église, parmi les fidèles, les ministres sacrés appelés clercs et les autres qui sont appelés laïcs » (DC 207.1). « Le Christ a confié aux apôtres et à leurs successeurs la charge d’enseigner, de sanctifier et de gouverner en son nom et par son pouvoir » (CEC 873). A propos de l'eucharistie : « Seul le prêtre validement ordonné est le ministre qui, en la personne du Christ, peut réaliser le sacrement de l'Eucharistie » (DC 900.1).
Et nos messes ? Nous sommes en présence de deux catégories de chrétiens bien distinctes, et ce, en vertu d'une institution divine - dont on se demande bien où se trouve sa justification dans le Nouveau Testament, institution qui donne un caractère sacré. Le prêtre a seul le pouvoir de « réaliser l'eucharistie », ou, pour prendre un autre vocabulaire plus courant, de faire advenir la « présence réelle » du Christ dans le pain consacré, pouvoir sacré qui entraîne tous les autres pouvoirs du prêtre. Et pas question pour les fidèles laïcs d'échapper à la gouvernance et au pouvoir des clercs : « Les fidèles sont tenus d'adhérer par obéissance chrétienne à ce que les Pasteurs sacrés, comme représentants du Christ, déclarent en tant que maîtres de la foi ou décident en tant que chefs de l'Église » (DC 212.1). La messe, donc l’eucharistie, serait-elle un lieu de pouvoir sur le peuple chrétien de la part du clergé ? C'est une évidence… pas toujours vue par les fidèles habitués voire soumis à la situation. La CIASE, dite aussi Commission Sauvé, au terme de son travail sur la pédophilie dans l'Eglise catholique a formulé 45 recommandations, dont celle-ci (n° 34) : « La commission considère qu’il convient de passer au crible : la constitution hiérarchique de l’Église catholique ; la concentration entre les mains d’une même personne des pouvoirs d’ordre et de gouvernement ; l’identification de la puissance sacramentelle avec le pouvoir. »
Voilà qui a le mérite de la clarté mais reste sans doute inaudible pour le clergé. Car ce clergé vit de ce qui est exprimé dans le Catéchisme de Jean-Paul II : « Dans le service ecclésial du ministre ordonné, c’est le Christ lui-même qui est présent à son Église… Le prêtre, en vertu du sacrement de l’Ordre, agit in persona Christi Capitis. C’est le Christ Jésus dont le ministre tient le rôle… A cause de la consécration sacerdotale qu’il a reçue, il jouit du pouvoir d’agir par la puissance du Christ lui-même qu’il représente (1548). Par le ministère ordonné, la présence du Christ… est rendue visible au milieu de la communauté des croyants (1549). Le sacrement de l’Ordre communique un pouvoir sacré qui n’est autre que celui du Christ » (1551).
Comment se justifient ces affirmations ? Le Caté renvoie à Lumen gentium (du concile Vatican II), à un texte de Pie XII, à Thomas d'Aquin, à Ignace d'Antioche, à Jean Chrysostome. Autrement dit, étant donné les fonctions ecclésiales de ces auteurs, le clergé se forge pour lui-même son statut, se crée ses propres règles, sa théologie, et, pour tout dire, son idéologie. Ainsi, il s'arroge un pouvoir de caractère sacré, venu de Dieu et du Christ. Pouvoir intangible qu'il est donc impossible de contester. Tout ceci ne tient pas dans notre culture démocratique. Il ne nous est plus possible d'admettre que des ordres tombent du ciel… ou seulement de la bouche du prêtre qui se considère investi d'un pouvoir sacré en direct avec Dieu.
En pratique, que voit-on ?
Lors de la messe, le chœur est le lieu réservé aux clercs, et disons familièrement aux seuls mâles : le ou les prêtres, diacre et enfants de chœur, lesquels reviennent de plus en plus alors qu'ils avaient disparu dans beaucoup d'églises. On peut soupçonner qu'il y a là l'espoir de voir de futurs séminaristes…
Dans certaines paroisses, on voit des fillettes affublées d'une cape blanche au premier rang de la nef : ce sont les « servantes d'assemblée » dont le rôle dépend en grande partie du curé : accueillir, faire la quête, etc. Les motivations annoncées par ces curés sont parfois étranges… et sexistes.
De nombreux détails sont décidés par le curé (nouveau curé, nouveaux changements sans concertation). Où s'assoient les lecteurs ? Où se place le diacre ? Quels chants seront choisis ? Peut-on chanter un Gloria qui ne soit pas le texte officiel ? etc.
Alors que l'encens avait disparu, des (nouveaux) curés le remettent en pratique sans demander le moindre avis des fidèles. Vêtements et objets liturgiques : retour au passé ! Chasuble (au lieu d'une aube et une étole), dalmatique des diacres, chape, voile huméral, pale pour couvrir le calice, etc. au bon gré du curé. Génuflexions et inclinations à n'en plus finir. Retour de l'adoration du « Saint Sacrement » avec chant du Tantum ergo.
« La liberté des enfants de Dieu ne se reçoit pas, elle se prend »
A ces pratiques imposées souvent sans concertation par les curés de paroisse, il faudrait ajouter ce qui provient de Rome : les derniers changements de la messe qui renforcent l’idée de sacrifice : « (…) pour que mon sacrifice qui est aussi le vôtre… » Là encore, les fidèles n'ont pas leur mot à dire et doivent se soumettre (les évêques, quant à eux, sont aux ordres de Rome comme les préfets aux ordres du pouvoir politique). Alors, on voit des chrétiens parlant avec leurs pieds : ils ne reviennent pas à la messe.
Que faire ? Bruno Mori écrit dans son livre Vers l'effondrement : « Si la notion de sacerdoce était définie comme service au lieu d'être définie comme pouvoir, les communautés chrétiennes ne connaîtraient pas la situation actuelle où elles ne sont plus capables de se réunir le dimanche pour faire la mémoire eucharistique de leur Seigneur, parce qu'elles manquent de prêtres en possession de «pouvoirs» de produire la «présence réelle» du Corps et de Sang de Jésus Christ. » On attribue au philosophe chrétien Maurice Blondel (1861-1949) cette déclaration : « La liberté des enfants de Dieu ne se reçoit pas, elle se prend. » C'est ce que font depuis des années les Communautés de base en France, qui partagent le pain et le vin dans la mémoire de Jésus de Nazareth… p
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La Messe autrement dit. Retour aux fondamentaux, Louis- Marie Chauvet, éd. Salvator, mai 2023.
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Messe : retour au « nous » baptismal
Après « Catholique autrement » de Ghislain Lafont, « Dieu autrement » et « L’Evangile autrement » de Raphaël Buyse, c’est au tour de Louis-Marie Chauvet de dire autrement… la messe de toujours(1). Ou plutôt de ne pas rêver d’une telle messe, puisque la célébration eucharistique n’aurait jamais dû se vivre hors d’un contexte socioculturel et historique. Celui qui a enseigné les sacrements et la liturgie à nombre de chrétiens par ses cours et ses écrits, après avoir évoqué le succès du rite zaïrois, se demande : « Pourquoi notre liturgie catholique, pleinement catholique, n’est-elle pas plus différente selon qu’elle est célébrée à Kinshasa, à San Antonio au Texas, à Pondichéry, à Séoul ou dans la banlieue parisienne ? »
Louis-Marie Chauvet invite à (re)découvrir, non les détails d’une liturgie mais les fondamentaux de la messe. Son érudition et ses convictions pastorales offrent quelques perspectives pour penser les situations que nous vivons dans notre Eglise quant à la liturgie, point de conflits et de crispations, mais aussi d’espérance, parce qu’il s’agit de « changer de paradigme, de se positionner alors, aussi sereinement que possible, dans une situation de transit : transit d’une figure d’Eglise (disons, pour résumer, celle héritée du Moyen Age et du concile de Trente) à une autre figure… laquelle ? Nul, je pense, ne peut le dire tant les mutations sont rapides ». Certes, ajoute le théologien, cette « figure sera bien catholique, structurée par le ministère des évêques et des prêtres, mais dans un style de gouvernance et de répartition des responsabilités, y compris sur le plan institutionnel qui fera de cette Eglise une réalité bien différente de celle que nous connaissons encore ». Nul nécessité donc d’une « nouvelle réforme liturgique, mais la prise de conscience de la nécessité d’une nouvelle inculturation de l’Evangile dans notre société postmoderne, opération dans laquelle la liturgie joue un rôle majeur » pour « approprier notre liturgie catholique à l’actuelle culture. De l’approprier chrétiennement (…) catholiquement ».
Le renversement évangélique
Toute la question est de savoir ce qu’est une liturgie catholique et si elle peut s’adapter ou s’inculturer ! Louis-Marie Chauvet présente un panorama pertinent des dernières décennies : « Jean XXIII avait demandé aux chrétiens d’ouvrir les fenêtres sur le monde. Les prêtres de ma génération, ainsi que de nombreux laïcs, se sont comme engouffrés dans cet appel d’air. Ils ont ouvert non seulement les fenêtres, mais les portes. Ils ont même renversés les murs - puisqu’ils venaient d’un monde éprouvé comme fait de trop de chrétienté : trop de prières, trop de morale, trop de doctrine. Evidemment, l’air de mai 1968 n’a fait qu’accélérer le mouvement. La jeune génération de cathos hérite, elle, d’une situation quasi opposée. Nous avions du ‘trop’ ; eux, plongés dans un monde ‘hypersécularisé’, éprouvent au contraire qu’il n’y a pas assez. D’où le réflexe bien compréhensible d’un certain repli identitaire, lequel est devenu, pour un nombre important de jeunes prêtres et de jeunes cathos, un véritable marqueur. »
Leur visibilité ne doit cependant pas faire illusion, et notre auteur n’oublie pas tous ceux qui, « si nombreux, ont quitté ou vont quitter le navire ».
Il n’est surtout pas sûr que ce retour à une certaine tradition soit un véritable ressourcement évangélique. Les jeunes « transposent inconsciemment deux des réflexes les plus caractéristiques de notre postmodernité : le réflexe individualiste, tellement opposé à ce ‘nous’ ecclésial (…), et le réflexe que je qualifierais, de manière non péjorative, de piétiste, qui cherche dans un surcroît d’attitudes pieuses ou de chants aux paroles intimistes, de quoi compenser les incertitudes engendrées par les déstabilisations contemporaines ».
L’Evangile renverse ces perspectives.
S’il y a bien un besoin de sacralité qui, « nécessaire, demeure, mais pour être mieux détournée au profit de ce que synthétise toute la Torah : le double amour pour Dieu et pour autrui, ou plutôt l’amour pour Dieu s’accomplissant dans l’amour pour autrui (…) » Il n’est donc plus question de se séparer du profane mais de spiritualiser tout le quotidien selon la formule de Rom 12, 1. Le vocabulaire biblique est d’ailleurs celui de la sainteté et non celui du sacré.
Notre auteur poursuit : « Dans le contexte actuel, des demandes météorologiques à Dieu ne feraient probablement qu’aggraver la déchristianisation (…) Cette contextualisation postmoderne n’appelle pas un surcroît de sacralité », alors même que c’est la tendance chez un certain nombre de prêtres et de laïcs : « La moindre messe dominicale dans une paroisse devient une messe ‘pontificale’, avec une profusion de servants dits d’autel et de servantes dites d’assemblée, de dentelle et d’encens, de gestes et de démarches hiératiques, de chant en ‘je’ individuel, et dont les paroles, en prise trop immédiate avec le mystère, demanderaient une élaboration moins facile. »
Tous célèbrent Justement, Louis-Marie Chauvet rappelle que « tous célèbrent ». Le rassemblement a pour but de faire de toutes les individualités un « nous », c’est-à-dire l’Eglise. Et de préciser, en citant le pape : « Rappelons-nous toujours que c’est l’Eglise, le corps du Christ, qui est le sujet célébrant et pas seulement le prêtre. » Une autre remarque : « La pratique de l’Eglise qui fait loi pour la théologie et non l’inverse (…) Or tout dans la liturgie est exprimé à la première personne du pluriel (…) Tout est exécuté en ‘nous’ (…) même dans la prière eucharistique. » Il y a une diversité des rôles, mais l’auteur n’hésite pas à appeler discrimination la distinction entre les garçons « servants d’autel » et les filles « servantes de l’assemblée ». La séparation entre le « service eucharistique » et celui du « corps ecclésial » n’a aucune légitimité théologique, et surtout, cette distinction fait fi de l’égalité baptismale promue par la lettre aux Galates : « Il n’y a plus ni homme ni femme… » (3,28) et « paraît tout simplement insupportable » au niveau culturel.
Pour une participation « active » de tous, Louis- Marie Chauvet prône plus d’ouverture, de souplesse, de simplicité… ce qui ne semble pas la tendance : « … avec la énième mouture de la Présentation du Missel romain, dont le degré d’ouverture est inversement proportionnel au nombre de pages, ou bien l’énorme missel qui trône désormais sur les autels de France et dont la masse donne le sentiment que c’est lui que l’on vient célébrer. »
La Parole et le Pain
Les deux parties de la messe, l’écoute de la Parole et le partage du Pain, ne forment « qu’un seul acte de culte ». Dans la constitution conciliaire Dei Verbum, il s’agit « d’une seule table ». L’Ecriture est aussi une nourriture, une Parole qui devient événement. Ce que note l’auteur, en citant la formule de Paul Beauchamp : dans la Bible, « il est écrit qu’autre chose est à écrire ». Si donc « il n’y a pas de Parole de Dieu sans passage par ce qui est écrit », il faut ajouter qu’entre la Parole et l’écrit, « il y a toujours un écart, écart qui demande interprétation ». Si cet écart est inconfortable, il est aussi une chance parce que la foi, sans cesse à interpréter, est aussi « ‘inculturable’1’ à toute époque et en toutes circonstances ».
Si la Parole est événement, elle touche notre corps, notamment par la communion qui est participation à l’itinéraire du Christ. Louis-Marie Chauvet résume : « La prière eucharistique : du Corps historique au Corps ecclésial moyennant le Corps eucharistique. » Ce qu’ont vécu les premiers disciples, nous le vivons en en faisant mémoire. « La prière eucharistique n’est pas (ou pas d’abord en tout cas) une prière d’adoration, mais une prière d’acclamation », « Cela se chante, bien sûr, debout, et non à genoux ». Il ne s’agit aucunement d’une dévalorisation de la présence réelle : « Il n’est à l’évidence pas besoin de dire que le Christ est présent, puisqu’on l’acclame comme vivant ! »
Il est vivant dans tous ceux et celles qui vivent de sa Parole, telle que résumée dans les paraboles du Samaritain et du jugement dernier, et pas seulement par ceux et celles qui viennent à la messe, même si ce temps de mémoire est fondamental pour raviver ce que Jésus a dit et fait. Comment ne pas rendre grâce pour cette présence de l’Homme de Nazareth ? La grande doxologie finale fait éclater la joie du Peuple de Dieu. Notre spécialiste de la liturgie ne peut s’empêcher d’ajouter : « L’on peut regretter que cette doxologie, qui avait fini dans les années 1970-1990 par être chantée par toute l’assemblée, lui ait été en quelque sorte enlevée de la bouche, au prétexte qu’elle fait partie de la prière réservées aux prêtres. »
Nous retrouvons l’importance du « nous ecclésial » puisque le but de la messe est la communion. Dans cette perspective, le geste de paix est « un rite d’importance théologique majeur ». Qu’il donne lieu à un certain « remue-ménage » nous rappelle qu’il n’y a pas de relation avec le Christ « sans que celle-ci passe par le visage d’autrui ». La communion qui constitue le corps ecclésial ne dit pas autre chose. Et nous voilà envoyés pour vivre ce que nous avons célébré…
Nul doute que ce petit livre rafraîchissant nous aidera à célébrer et à faire de la Bonne Nouvelle un événement pour aujourd’hui
. p Pascal Janin